Soignantes en action : réseaux, circulations et pratiques de santé au féminin au Sud de la Méditerranée (Syrie, Liban), 1920-1948

En 2022, les Talibans au pouvoir en Afghanistan ont interdit aux femmes du pays d’accéder à l’enseignement supérieur. On observe une tendance à ce type de restriction dans plusieurs pays du Moyen-Orient, qu’il s’agisse de la Syrie ou de l’Iran. Pour l’UNICEF comme pour d’autres ONG, cet « effacement des femmes » aura des « conséquences désastreuses » dans le champ médico-social, empêchant la formation des soignantes qui œuvrent d’abord, et depuis longtemps, à l’amélioration de la santé des femmes et des enfants.

En effet, au Moyen-Orient, la santé maternelle et infantile a longtemps été un domaine réservé aux femmes, matrones traditionnelles assistant les parturientes, puis véritables professionnelles de santé (pédiatres, gynécologues…) avec l’avènement de la biomédecine à la fin du XIXème siècle. Pourtant, leur histoire reste largement négligée. Notre projet de doctorat veut participer à combler ces carences historiographiques, tout en mettant les soignantes au centre de la médicalisation du monde en analysant leur œuvre dans deux espaces sous influence française, la Syrie et le Liban, entre 1920, début du mandat français sur ces territoires, et 1948, qui marque la création de l’OMS au lendemain de l’indépendance des deux mandats, en 1946. L’histoire de la santé en situation coloniale constitue une part importante de l’histoire globale de la santé. En mettant en lumière le rôle des soignantes, notre étude aspire à apporter un nouvel éclairage sur le contexte colonial et l’histoire de la santé, à rendre visible la transformation des pratiques, qu’il s’agisse de celles des soignantes ou des soignés, et enfin à démontrer que l’évolution des connaissances médicales et pharmaceutiques dans ces deux pays découle d’échanges féminins transnationaux, et non seulement de l’œuvre de médecins coloniaux et nationalistes.